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Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued

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Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued Empty Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued

Message par hammami khalfallah Jeu 3 Déc 2009 - 18:40

Belkacem Hadjadj : «Pouvoir manipuler une caméra ! »

Par Mr AOUED Djillali (écrivain)
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 090710121119436764041491
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203125840436764979660
J’ai rencontré mon ami Hadjadj Belkacem au cinéma El Feth, à Saîda, à l’occasion des journées cinématographiques organisées en octobre dernier, par le CLS et la Direction de la Culture.
En fait, Hadjadj Belkacem n’est pas à présenter ; il est déjà célèbre de par son palmarès qui est extrêmement riche (études de cinéma dans un institut belge dans les années 70, doctorat à Paris en 80, plusieurs prix et plusieurs films dont « machaho » qui a fait un tabac en France durant les années 90 et enfin le célèbre feuilleton « taxi el majnoun » qui nous a fait rire et réfléchir en même temps.
Simple, très motivé, égal à lui-même, Hadjadj n’a ménagé aucun effort pour la réussite de cette manifestation. Le public a bien apprécié son sérieux et la qualité de ses interventions pendant les débats (après la projection des films et lors des tables rondes).
Mais se contenter de ces quelques remarques serait réduire la personnalité de Hadadj à un simple rôle d’animateur. Or Hadjadj est un intellectuel dans le sens où, (depuis l’affaire Dreyfus), le mot « intellectuel » implique savoir et engagement dans les grandes causes, notamment ; quelqu’un « qui se mêle de ce qui ne le regarde pas », ironisait un brave penseur dont j’ai oublié le nom. En plus, et c’est ce qui est le plus important, Belkacem est un cinéaste ; c’est-à-dire, un artiste (qui combine fiction et réalité) et, en ce qui le concerne, il a choisi de s’adresser à sa société et à l’Homme d’une façon générale, par la médiation de ses productions cinématographiques.
Son dernier film « manara » qui a été projeté pendant ces journées cinématographiques, suscite beaucoup d’interrogations ne serait que par son réalisme, la complexité de ses situations et son approche thématique.
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203044954436764981130 Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203044955436764981131
1-Quelques mots sur « manara » :

« Manara » de Belkacem Hadjadj est un film qui s’apparente un peu à ce qu’on a appelé « la littérature de l’urgence » pour caractériser un ensemble d’œuvres littéraires apparu spontanément dans les années 90 et dont la vocation consistait à témoigner par devoir, d’une réalité nationale marquée par la violence.
Des images grandioses qui crèvent l’écran, une charge émotionnelle bien servie par des moyens appropriés (son, lumière, bruitage, couleurs) saisissent vivement le spectateur et le plongent dans le feu de l’action, l’interpellent, en font presque un acteur. En effet, on avait l’impression de vivre l’histoire. L’indifférence n’est pas de mise, semble nous dire Hadjadj qui a pris d’énormes risques à traiter de l’histoire immédiate, du terrorisme qui a failli entraîner la disparition de notre nation. A travers les situations complexes, les scènes qui se heurtent, les destinées qui se croisent, le film nous invite à réfléchir.
On passe d’une situation initiale paisible où la joie de vivre cohabitent sans problème avec la tradition religieuse (manara) à une situation de chaos en transitant (à partir du 5 octobre 88) par des situations conflictuelles et des combats fratricides qui auraient pu déboucher sur une transition démocratique si…..
Le film se termine par un message d’espoir (une fillette, courant librement dans un espace couvert de ruines, suivie d’une femme en tailleur et non en hidjab). Ce message est plus un épilogue qu’un dénouement proprement dit puisque l’histoire se termine par une situation problématique : l’actrice principale, (mariée à un journaliste démocrate) est enceinte d’un gosse conçu au maquis lors d’un viol. L’avenir de l’enfant est déjà en jeu ; de même que la relation des différents protagonistes. Donc, histoire à suivre.
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203125924436764979671
Le film s’ouvre sur une ambiance de fête dans une ville du littoral algérien : une population en liesse commémorant l’anniversaire du prophète et, parallèlement, en privé, un trio de jeunes rayonnant de bonheur et de santé (une fille et deux garçons) fêtant dans un studio, l’anniversaire de la fille. Le lieu, un espace typiquement méditerranéen, est éclairé par un soleil radieux, sur un fond bleu ; une brise marine soulève de temps en temps les branches des arbres et la chevelure noir ébène des belles filles au teint blanc tirant légèrement sur le brun.
Le rite, profondément ancré dans la société devient, subitement un enjeu idéologique : défendu farouchement par les gardiens du temple et attaqué par quelques individus apparemment nourris d’une nouvelle vision. Dans ce face-à-face, les arguments religieux se croisent en l’air comme le fer des gladiateurs.
De l’autre côté, dans l’univers juvénile, évoluant sur un autre tableau, les deux garçons sont épris séparément de la même fille et sont donc engagés à leur insu, dans une rivalité sentimentale qui cache une situation triangulaire source de tous les maux.
Voilà, le décor est planté, les thèmes annoncés et la trame narrative amorcée. Hadjadj joue sur deux plans parallèles et laisse aux spectateurs, la liberté de jeter les passerelles nécessaires ; il ne donne pas d’explication, il suggère. Il est, à tout le moins, aisé de constater à ce niveau déjà, que le vocable « manara » subit une opération de surcodage : il dépasse le fait de désigner un objet pour devenir un faisceau de symboles. On comprend qu’il s’agit du conflit des deux types de lecture de l’Islam qui a plongé notre pays dans une drôle de « guerre civile » qui se prolonge encore aujourd’hui sous d’autres formes.
La fiction est vite court-circuitée pour ainsi dire, pour laisser place à une vision réaliste laquelle introduit, non pas un schéma explicatif à plaquer bêtement sur une réalité mais une problématique, en faisant appel à l’histoire immédiate du pays (le soulèvement du 8 octobre 88, le processus d’islamisation de la population, le terrorisme, la guerre sans merci entre les islamistes et les démocrates, entre le fanatisme et le rationalisme, …).
Une bonne partie du film est consacrée au fossé qui se creuse au fur et à mesure entre les deux jeunes amis : un journaliste qui reste fidèle jusqu’à la fin, à la voie démocratique et un médecin qui s’en écarte et devient intégriste ; un fidèle qui, à travers la prière collective à la mosquée qui devient obligatoire à tous les moments de la journées et des actions caritatives, s’enfonce irrémédiablement dans les profondeurs de l’obscurantisme ; un qui reste vigilant et ne peut rien faire à part résister individuellement à la vague déferlante de l’intégrisme ; un qui rejoint les terroristes au maquis et viole la femme de son ami par complexe et par vengeance et l’autre qui se fait prendre dans un faux barrage et paie une rançon pour sauver sa peau et qui récupère à la fin, sa femme malgré sa grossesse (d’un enfant naturel).
Nous vivons la deuxième partie du film dans un maquis à l’occasion d’un faux barrage tendu la nuit par des terroristes en pleine campagne. Le scénariste nous propose un test, un avant-goût d’une vie sous un Etat islamiste au cas où ! Une armée bien structurée avec ses chefs, ses hommes de main, son tribunal, ses muphtis ; la légalité est de leur côté ; les autres sont des hors-la loi, taillables et corvéables ; comptables de leur « soumission » à l’ordre républicain. Les « prisonniers » sont traités comme dans les temps reculés, c’est-à-dire des éléments de butin, propriétés de ceux qui les ont capturés ; les femmes vivent en troupeau, au service exclusif des hommes ; elles ne valent que par leurs bras et leur sexe.
Le film se termine par une vision optimiste : le médecin terroriste se rachète en aidant les deux femmes (dont celle de son ex-ami, qu’il a violée) à fuir le maquis, la population continue à célébrer la fête religieuse (échec/disqualification de l’intégrisme); le triomphe du pardon et de la tolérance ; la prise de conscience de la femme…..
2- Entretien avec Belkacem Hadjadj :

Question:
Je voudrais te poser une première question sur tes impressions : qu’est-ce que tu éprouves en ce moment dans une salle de cinéma, dans ta ville natale?
Réponse:
Je suis très heureux de me retrouver dans ma ville et de voir que les choses reprennent vie ; c’est un très grand plaisir pour moi. D’abord c’est une occasion pour moi de revoir des amis que je n’ai pas vus depuis très longtemps; ensuite, de constater que la vie culturelle reprenne ; Saida mérite mieux que ce qu’elle a vécu jusqu’ici ; Ça fait longtemps que je disais à mes amis saïdéens que je rencontrais de temps en temps lors de mes visites familiales : faites quelque chose, nous, on est derrière vous, on ramènera tous nos amis on est là, on soutiendra de toutes les manières possibles une quelconque activité ;
Donc quand je reviens à Saïda et que je retrouve une infrastructure culturelle prête, qui ne demande qu’à être utilisée (une salle comme celle d’El Feth qui est un joyau, celle de la maison de la culture que j’ai visitée ce matin ou encore celle d’Aïn El Hadjar, qui va bientôt s’ouvrir), je me dis que c’est un très bon signe. Nous devons utiliser ces infrastructures sinon, à quoi elles servent.
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203125938436764979674
Question:
Est-ce qu’il y a quelque chose d’autre de positif, mis à part l’infrastructure?
Réponse:
Oui, oui, il y a quelque chose d’autre, c’est la participation du public; il ’y avait pas beaucoup de monde ce matin. Je reconnais que la participation aux débats est un peu timide et que le niveau de discussion n’est pas toujours à la hauteur mais c’est normal pour une première rencontre
Question:
Normal par rapport à la situation que nous avons vécue ou par rapport à quelque chose d’autre ?
Réponse:
En matière culturelle d’une façon générale, (et je prends le cinéma comme exemple ou comme repère), depuis le milieu des années 80 jusqu’à pratiquement 2004, c’était le brouillard le plus total ; mis à part quelques individualités qui ont résisté, l’un a réussi à faire un film, l’autre à monter une pièce de théâtre. En tout cas, la vie culturelle d’une manière générale a été perturbée par les événements qu’a connus le pays.
Question:
Tu penses que c’est une simple rupture et que la vie culturelle pourrait reprendre dans quelques temps ; cette manifestation en est peut-être un signe parmi d’autres?
Réponse:
J’espère bien, sinon y a qu’à aller se jeter à la mer en tout cas, moi, je ne suis pas pessimiste; je suis sûr que les choses pourraient repartir
Question:
La majorité des intellectuels sont pessimistes, d’ailleurs beaucoup sont partis pour de bon pour l’étranger, toi tu en fais exception ; tu es plein d’espoir. Sur quoi est fondé cet espoir ? Est-ce qu’il est fondé sur des indices réels ou est-ce une intuition?
Réponse:
Moi, je pars du principe suivant ; là où il y a de la vie, il y a de l’espoir
Question:
Donc, d’après toi, une société ne peut pas vivre sans culture
Réponse:
Mais bien sûr. Le problème est de savoir de quelle culture on parle et quelle serait la nature de cette culture où il y a de la bagarre à mener, la lutte à mener, parce que la nature a horreur du vide. Si tu laisses le terrain vide, d’autres viendront l’occuper, qui ont d’autres intentions que toi, qui ont d’autres visions de la société. Nous voulons du bien à notre société, nous devons donc occuper le terrain ; il faut être présent.
Question:
C’est un problème d’engagement, dans ces conditions ?
Réponse:
Evidemment, on ne peut pas faire un travail comme ça si on n’est pas engagé,
Question:
S’agit-il d’une espèce de militantisme ou d’un engagement au sens large général ?
Réponse:
Je n’utilise plus cette terminologie ; vous savez, quand on travaille dans un pays comme l’Algérie, continuer de faire du cinéma, du théâtre et de la musique, essayer de travailler pour le retour de la paix sociale, pour la réconciliation de la société, oui, on peut appeler ça du militantisme ; il faut travailler pour le bien de tout le monde ; sinon, il vaut mieux aller se coucher parce qu’on est en train de remonter la pente. Il ne faut pas oublier que la société algérienne est partie du chaos ; dans les années 90, il y avait des gens qui venaient fermer les salles de cinéma ; il n’y a qu’à ce rappeler les événements de la cinémathèque de Bordj Bou Arreridj, où des gens sont venus menacer les cinéphiles.
Question:
Quand tu parles de « gens », tu vises qui exactement ?
Réponse:
Je fais allusion, évidemment au courant islamiste, qui voulait régenter la société, il est évident que la régression de la société a fait développer au sein d’une bonne partie de la société, des réflexes très conservateurs, on l’a vu hier aux débats.
Question:
Je pense que ces comportements existaient déjà de façon latente ; l’avènement du FIS n’a fait que les réactiver, les encourager ; il ne les a pas créés?
Réponse:
Mais, bien entendu, tout est latent dans une société, le fascisme est latent dans une société comme la démocratie d’ailleurs. Le tout est de savoir quelle est la dynamique qui va opérer dans cette société, qui va révéler, faire vivre et sortir ce qui est latent ; si on laissait la société algérienne avec ses propres réflexes de pesanteur, c’est le conservatisme qui prendra le dessus. Donc il faut que les modernistes (entre guillemets) que les démocrates et tous les autres travaillent pour la faire avancer. Si on laisse les forces de pesanteur opérer seules, c’est sûr que la société va se fermer complètement. Il y a un travail à faire et c’est ce que j’appelle remonter la pente.
Question:
Quel est le rôle du cinéma dans ce travail-là, je parle du cinéma en tant que véhicule de l’imaginaire et des mythes d’une société ?
Réponse:
Le rôle du cinéma et de l’audiovisuel d’une façon général (car on ne peut pas les détacher) ; est de servir de locomotive pour l’ensemble des activités culturelles. Sur ce plan –là, justement, l’important est de savoir choisir le type de cinéma qui réponde à ce rôle. Ce n’est certainement pas celui qui consiste à copier les autres ou qui caresse la société dans le sens du poil. Le cinéma et l’art, d’une façon général, n’a d’utilité et n’est intéressant que par son côté subversif, que s’il interpelle la société, que s’il la pousse à avoir un regard critique sur elle-même.
Question:
Est-ce que tu penses qu’actuellement, le cinéma joue ce rôle-là, est-ce qu’il bouscule la société ; est-ce qu’il la met face à sa réalité ?
Réponse:
Hier, le film de Teguia nous a montré la violence avec laquelle certains spectateurs avaient réagi, par rapport à quelques images du film; ce n’était pourtant que des images, j’étais très surpris par cette espèce de pudibonderie de la part de personnes de notre génération, qui viennent dire pourquoi on voit des bouteilles de bière dans le film, pourquoi on voit un corps nu. Mais ce n’est un film, qu’une image, dire ce genre de choses c’est des réflexes des plus négatifs, qui font vraiment peur. Dire « il ne faut pas », c’est déjà quelque part, une atteinte à la liberté ; tu peux dire « je ne suis pas d’accord » et tu peux développer ton analyse mais tu n’as pas le droit de dire « il ne faut pas »
Question:
Le cinéma algérien, actuellement, la part du réaliste et celle de la fiction ?
Réponse:
De toute les façons, un film, c’est de la fiction, même si c’est un documentaire en ce sens où, un documentaire, (sur n’importe quoi), raconte une vie en 50 minutes. Quand il la ramasse sur une cinquantaine de minutes, il y a quelque part, une part de fiction. Pour revenir à ta question, je sais ce que tu veux dire : est-ce que c’est un cinéma qui se préoccupe de la réalité et qui essaie de la montrer en images.
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203010002436764979677
Question:
Pour poser directement la question, est-ce que le réaliste au cinéma se manifeste uniquement que par l’aspect thématique ?
Réponse:
A partir du moment où un film traite des problèmes d’une société et qu’il transforme ça en récit ou en histoire, c’est de la fiction. Maintenant, le degré de l’identité de la chose varie. Il y a un cinéma très proche de la réalité et un cinéma complètement éloigné de la réalité, jusqu’à la science fiction. Entre les deux, il y a tous les degrés de variables de ce rapport avec la réalité. Je pense que depuis longtemps, le cinéma algérien est très proche de la réalité et surtout le reflet de la réalité. Maintenant, on assiste à l’apparition d’une nouvelle génération qui vient avec une nouvelle vision qui travailler par internet, s’inspire de cette espèce d’onirisme, de fiction,
Question:
Sur le plan esthétique, comment caractériser l’art de Belkacem HADJADJ ?
Réponse:
C’est aux autres de le caractériser, pas à moi, tout ce que je peux dire c’est moi, je suis mes pulsions, je suis mes élans et je fais des images des films, c’est aux autres de dire ce qu’ils en pensent.
Question:
Ton premier film c’était « le bouchon », si je ne me trompe pas ?
Réponse:
Oui, j’ai travaillé à la télévision belge, j’ai fait des travaux de reportage et de documentaires etc. j’ai fait une pièce de théâtre avant le bouchon, sinon le « bouchon » est la première œuvre achevée de fiction.
Question:
Le bouchon traitait, si je me souviens bien, d’un problème social ?
Réponse:
Al’époque, j’étais très proche de la comédie italienne, qui nous avait bercés pendant les années 70 et donc, d’inspiration du néoréalisme italien c’est ce regard, pudique, satirique sur la société. Tout en traitant de sa réalité qui avait sous-tendu ma préoccupation, filmique, cinématographique dont le bouchon
Question:
Tu es passé ensuite à la série des bandits d’honneur, ça entre dans quelle perspective ?
Réponse:
C’était un questionnement important pour moi, de moi, cinéaste à ma société, laquelle est basée sur un modèle de conception axé sur la tradition orale et sur l’oralité. La question : comment raconter une histoire avec des images, dans un pays qui a un problème avec l’image, parce que c’est une société à tradition orale d’une part, d’autre part, parce l’image a été introduite chez nous par le pouvoir colonial qui l’a utilisée contre la société algérienne, et, ça c’est un long débat, je cite au fameux rapport ambigu de l’islam avec l’image, je suis certain que ce genre de chose a profondément travaillé la société, et a piégé/biaisé son rapport à l’image. Quand je me suis posé ce problème-là, j’ai voulu réfléchir de manière systématique et je me suis dit que la meilleur façon c’était de confronter la caméra avec une matière orale et j’ai utilisé le bandit d’honneur parce que le bandit d’honneur n’existe que dans la mémoire collective des gens à travers la parole, la poésie, les témoignages, les chansons, Alors, comment parler d’un personnage absent qui n’existe qu’à travers la parole et le verbe. Comment l’aborder avec des images
Question:
Est-ce un contre discours ?
Réponse:
Non ! C’était le thème de mon doctorat que j’ai soutenue à Paris avec Bouziane el kali ; l’intitulé « image et tradition orale en Algérie ».
Question:
A travers ça il y avait un problème d’histoire (du pays) !
Réponse:
Oui, ça va de soi ; à partir du moment où on parle du passé, on parle de l’histoire ; de la perception du passé.
Question:
Il y avait deux discours sur notre société : un discours colonial et un discours national sur l’histoire de notre pays ; quelle était ta position?
Réponse:
Ecoute, moi, je ne suis pas historien, je pense qu’il faut laisser les historiens faire leur travail sur le passé de l’Algérie ; c’est clair. Mais cela ne doit pas m’empêche pas de dire que nous avons été sevrés de notre passé, ce passé a été instrumentalisé par le pouvoir colonial qui en a fait une lecture en fonction de ses intérêts et puis, après 62, le même phénomène s’est continué puisque l’histoire de l’Algérie a été instrumentalisée aussi par les gouvernants de ce pays-là, pour des raisons idéologiques, pour renforcer leur pouvoir, à partir du moment où ce sont les politiques qui font l’histoire. Donc, dans les cas de figure, ça ne va pas ; moi, je pense (et je ne suis le seul à le penser) qu’il faut laisser les historiens faire l’histoire, de la manière la plus libre et la plus objective.
Question:
A cette époque, les historiens n’ont pas pu jouer leur rôle pour des raisons que tout le monde connaît même si quelques uns ont osé faire quelque chose. Je pense, et c’est tout à fait normal, comme ça s’est passé dans tous les pays, c’est l’art qui est venu combler ce vide.
Réponse:
Parler de l’histoire en tant que science, analyser le passé d’un pays, c’est une chose, s’inspirer de ce passé pour faire un film c’est autre chose ; dans ce travail, il faut éviter d’abus de ce passé. Pour retracer de manière précise un événement du passé, ou une histoire quelconque, un personnage historique quelconque, il faut absolument faire ça avec la collaboration d’historiens.
Question:
Mais on peut s’inspirer d’un personnage réel pour faire un personnage fictif, enfin, c’est de la fiction même si ce personnage a existé ; le film, dans sa totalité, est une fiction, le matériau du film tu es allé le chercher dans l’histoire, comme Bouziane El Kalii et Djillali El Gataa.
Réponse:
Oui, mais ça, ce n’est pas de l’histoire, je conviens que j’ai fouillé les documents, j’ai retrouvé des documents concernant des personnages réels, comme Bouziane El Kalli, mais ce qui m’intéresse c’est le fait qu’il ait donné naissance à un bandit d’honneur fictif. Le bandit d’honneur, je le définis comme un individu qui défie l’autorité dans une société opprimée
Question:
Comme Robin des Bois !
Réponse:
Voilà ! A ce moment-là, l’imaginaire collectif s’en empare et extrapole puisqu’il lui fait faire des choses qu’il n’a jamais faites donc, le bandit d’honneur en tant que mythe ; voilà ce qui m’a intéressé, c’est pour ça que j’ai privilégié la parole des témoins, c’est de là que naît le mythe.
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203010033436764979689
Question:
Mais la culture populaire est marquée par des représentations contradictoires
Réponse:
Oui ; dans les enquêtes que j’ai menées dans la région de Mascara, j’ai constaté que le bandit d’honneur est un géant pour certains et pour d’autres, à deux mètres plus loin, c’est un nain, c’est ça la richesse du pays. le dernier film « manara », que j’ai réalisé dans des conditions difficiles, est un défi en soi, vu les conditions difficiles dans lesquelles nous travaillons, là, ma position était claire : en tant que cinéaste, j’ai considéré qu’il était de mon devoir de faire un film sur cette douloureuse période qu’a traversé le pays ; j’ai le privilège de me servir d’une caméra pour témoigner de ce qui se passe dans mon pays ; donc j’ai une part de responsabilité quelque part, à travers ce que je vais dire dans mes films, je me suis dit que je ne peux pas fermer les yeux sur ce qui se passe dans le pays, il faut que je fasse des films ne serait-ce que des films témoins de cette période-là, pour les générations futures ; c’est un peu ça, le sens du film « manara » ; j’ai essayé de comprendre la diabolique mécanique qui nous a amenés à vivre la fameuse décennie 90 et qui a plongé le pays dans l’absurde et le chaos. J’ai fait un film qui n’a pas la prétention de trouver des solutions, ou des explications, c’est un regard de cinéaste qui fait, avec le peu de lucidité que nous laisse la situation, de faire un film avec l’intention que je puisse être utile
Question:
Le film se termine par une situation problématique, une énigme, pour être plus précis : l’héroïne tombe enceinte à la fin du film d’un enfant dont la conception et donc la paternité, pose problème : fils naturel d’un terroriste et appelé être adopté et élevé par l’ancien rival et l’ennemi de son père. C’est une situation tragique dans le sens où elle ne trouve pas de solution ou est-ce une fin ouverte ?
Réponse:
Ca dépend ; le film est basé sur trois personnages ; une fille et trois garçons, amoureux depuis leur enfance, comme trois doigts d’une seule main et qui sont traversés par une amitié amoureuse des deux envers la fille
Question:
Est-ce que la fille est le symbole de l’Algérie ?
Réponse:
Absolument
Question:
Et chacun l’aime à sa façon ?
Réponse:
Oui, bien sûr celui qui va devenir islamiste l’aime, le journaliste démocratique l’aime aussi. Le problème c’est de dire et d’appeler à la tolérance, « ce n’est pas parce que je ne partage pas ton point de vue que j’ai le droit de te détruire » ; en gros, le message de ce film c’est de dire voilà, de la même manière que ce trio a été déchiqueté, c’est toute la société qui est menacée, et donc, soyez vigilants, acceptons la différence mutuelle, et ne perdons pas le sens important de la chose qui est l’intérêt de la société,
Question:
Dans le film, tout le drame surgit avec les événements du 5 octobre. Que représente cette date ; la fin d’une époque ou est-ce le début d’une catastrophe ?
Réponse:
Ni l’une, ni l’autre, le 5 octobre est un repère.
Question:
Mais la culture populaire est marquée par des représentations contradictoires
Réponse:
Oui ; dans les enquêtes que j’ai menées dans la région de Mascara, j’ai constaté que le bandit d’honneur est un géant pour certains et pour d’autres, à deux mètres plus loin, c’est un nain, c’est ça la richesse du pays. le dernier film « manara », que j’ai réalisé dans des conditions difficiles, est un défi en soi, vu les conditions difficiles dans lesquelles nous travaillons, là, ma position était claire : en tant que cinéaste, j’ai considéré qu’il était de mon devoir de faire un film sur cette douloureuse période qu’a traversé le pays ; j’ai le privilège de me servir d’une caméra pour témoigner de ce qui se passe dans mon pays ; donc j’ai une part de responsabilité quelque part, à travers ce que je vais dire dans mes films, je me suis dit que je ne peux pas fermer les yeux sur ce qui se passe dans le pays, il faut que je fasse des films ne serait-ce que des films témoins de cette période-là, pour les générations futures ; c’est un peu ça, le sens du film « manara » ; j’ai essayé de comprendre la diabolique mécanique qui nous a amenés à vivre la fameuse décennie 90 et qui a plongé le pays dans l’absurde et le chaos. J’ai fait un film qui n’a pas la prétention de trouver des solutions, ou des explications, c’est un regard de cinéaste qui fait, avec le peu de lucidité que nous laisse la situation, de faire un film avec l’intention que je puisse être utile
Question:
Le film se termine par une situation problématique, une énigme, pour être plus précis : l’héroïne tombe enceinte à la fin du film d’un enfant dont la conception et donc la paternité, pose problème : fils naturel d’un terroriste et appelé être adopté et élevé par l’ancien rival et l’ennemi de son père. C’est une situation tragique dans le sens où elle ne trouve pas de solution ou est-ce une fin ouverte ?
Réponse:
Ca dépend ; le film est basé sur trois personnages ; une fille et trois garçons, amoureux depuis leur enfance, comme trois doigts d’une seule main et qui sont traversés par une amitié amoureuse des deux envers la fille
Question:
Est-ce que la fille est le symbole de l’Algérie ?
Réponse:
Absolument
Question:
Et chacun l’aime à sa façon ?
Réponse:
Oui, bien sûr celui qui va devenir islamiste l’aime, le journaliste démocratique l’aime aussi. Le problème c’est de dire et d’appeler à la tolérance, « ce n’est pas parce que je ne partage pas ton point de vue que j’ai le droit de te détruire » ; en gros, le message de ce film c’est de dire voilà, de la même manière que ce trio a été déchiqueté, c’est toute la société qui est menacée, et donc, soyez vigilants, acceptons la différence mutuelle, et ne perdons pas le sens important de la chose qui est l’intérêt de la société,
Question:
Dans le film, tout le drame surgit avec les événements du 5 octobre. Que représente cette date ; la fin d’une époque ou est-ce le début d’une catastrophe ?
Réponse:
Ni l’une, ni l’autre, le 5 octobre est un repère.
Question:
Mais la culture populaire est marquée par des représentations contradictoires
Réponse:
Oui ; dans les enquêtes que j’ai menées dans la région de Mascara, j’ai constaté que le bandit d’honneur est un géant pour certains et pour d’autres, à deux mètres plus loin, c’est un nain, c’est ça la richesse du pays. le dernier film « manara », que j’ai réalisé dans des conditions difficiles, est un défi en soi, vu les conditions difficiles dans lesquelles nous travaillons, là, ma position était claire : en tant que cinéaste, j’ai considéré qu’il était de mon devoir de faire un film sur cette douloureuse période qu’a traversé le pays ; j’ai le privilège de me servir d’une caméra pour témoigner de ce qui se passe dans mon pays ; donc j’ai une part de responsabilité quelque part, à travers ce que je vais dire dans mes films, je me suis dit que je ne peux pas fermer les yeux sur ce qui se passe dans le pays, il faut que je fasse des films ne serait-ce que des films témoins de cette période-là, pour les générations futures ; c’est un peu ça, le sens du film « manara » ; j’ai essayé de comprendre la diabolique mécanique qui nous a amenés à vivre la fameuse décennie 90 et qui a plongé le pays dans l’absurde et le chaos. J’ai fait un film qui n’a pas la prétention de trouver des solutions, ou des explications, c’est un regard de cinéaste qui fait, avec le peu de lucidité que nous laisse la situation, de faire un film avec l’intention que je puisse être utile
Question:
Le film se termine par une situation problématique, une énigme, pour être plus précis : l’héroïne tombe enceinte à la fin du film d’un enfant dont la conception et donc la paternité, pose problème : fils naturel d’un terroriste et appelé être adopté et élevé par l’ancien rival et l’ennemi de son père. C’est une situation tragique dans le sens où elle ne trouve pas de solution ou est-ce une fin ouverte ?
Réponse:
Ca dépend ; le film est basé sur trois personnages ; une fille et trois garçons, amoureux depuis leur enfance, comme trois doigts d’une seule main et qui sont traversés par une amitié amoureuse des deux envers la fille
Question:
Est-ce que la fille est le symbole de l’Algérie ?
Réponse:
Absolument
Question:
Et chacun l’aime à sa façon ?
Réponse:
Oui, bien sûr celui qui va devenir islamiste l’aime, le journaliste démocratique l’aime aussi. Le problème c’est de dire et d’appeler à la tolérance, « ce n’est pas parce que je ne partage pas ton point de vue que j’ai le droit de te détruire » ; en gros, le message de ce film c’est de dire voilà, de la même manière que ce trio a été déchiqueté, c’est toute la société qui est menacée, et donc, soyez vigilants, acceptons la différence mutuelle, et ne perdons pas le sens important de la chose qui est l’intérêt de la société,
Question:
Dans le film, tout le drame surgit avec les événements du 5 octobre. Que représente cette date ; la fin d’une époque ou est-ce le début d’une catastrophe ?
Réponse:
Ni l’une, ni l’autre, le 5 octobre est un repère.
Belkacem HADJADJ "pouvoir manipuler une camera"Par Mr Aoued 091203125825436764979659
Question:
A quoi ça sert de faire du cinéma actuellement puisque d’une part, la corporation est acculée à l’exil ou au silence et d’autre part, et d’autre part, la société à laquelle s’adresse l’art, à laquelle sont destinés ses messages, tourne le dos à l’art ?
Réponse:
Ce pessimisme n’est pas sans fondement. Effectivement, à première vue, l’art n’a pas un rôle important dans une société confrontée à des problèmes profonds que l’artiste est incapable de résoudre. Mais au XXI° siècle, une société peut-elle vivre sans art ? Autant de questions qui méritent un large débat.

hammami khalfallah
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